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Le scénario publié ici est le scénario de production,
c'est à dire le dernier jet de scénario qui a servi à
la production du film. Tout ce qui est imprimé dans ces pages a
donc été tourné. Mais tout ne s'est pas retrouvé
dans le montage final du film. Le premier montage de Oui,
mais... faisait en effet 2 h 10. C'était très long.
Trop long. Nous nous sommes rendus compte que certains éléments
qui passaient bien à la lecture devenaient ennuyeux à l'image
ou ralentissaient le rythme de l'ensemble. Nous avons alors réduit
les dialogues et les démonstrations du thérapeute. Nous
avons également resserré l'action sur Eglantine, ce qui
nous a amenés à supprimer certaines scènes ou à
en raccourcir d'autres. Certains rôles ont ainsi complètement
disparu. D'autres ont été appauvris. La version publiée
ici donne à découvrir les quelques 25 minutes qui ont été
coupées. Elles ont été grisées pour permettre
aux lecteurs qui le souhaitent de lire, en les sautant, la version définitive
du scénario. Le DVD contiendra, parmi ses bonus, plusieurs des
scènes coupées au montage.
Les notes que l'on trouvera en fin d'ouvrage sont de plusieurs natures.
Un bon nombre d'entre elles concernent le sens et, plus particulièrement,
tout ce qui a trait à la psychothérapie. Que ce soit par
internet ou à l'occasion de projections-débats, de nombreuses
questions m'ont été posées sur le sujet du film.
J'en ai tenu compte. D'autres notes sont consacrées au passage
du texte à l'image et à ses conséquences sur le scénario
final. Car l'expérience, formidable, de ce premier film a été
l'occasion d'apprendre un peu plus mon métier, de scénariste
comme de réalisateur. J'ai eu confirmation d'un phénomène
que j'avais déjà vécu en faisant mes courts métrages.
Malgré tout le soin apporté en amont à l'écriture
du scénario, la mise en image d'un texte de cinéma, son
incarnation par des comédiens, l'apport de toute l'équipe
de tournage et de post-production, tout cela contribue à modifier
le film qui pré-existe sur le papier. On le verra plus bas avec
l'exemple d'une erreur de costume, c'est parfois même un avatar
de tournage qui peut enrichir le film. Je n'en déduis pas pour
autant que je devrais à l'avenir me laisser aller sur l'écriture
et compter sur le tournage ou le montage pour régler tous les problèmes
de récit mais c'est instructif de constater qu'on ne peut pas tout
bétonner dans le scénario de départ.
Il sera souvent question de "nous", c'est à dire du monteur,
Dominique Pétrot, des producteurs, François Kraus et Denis
Pineau-Valencienne, et de moi-même. Si je n'avais pas été
également l'auteur de ce film, je pense que j'aurais associé
le ou les scénariste(s) aux décisions qui ont eu une incidence
importante sur le sens et la construction. Car les modifications de montage
contribuent à réécrire le scénario définitif.
Cela rejoint mon insistance à signer "un film réalisé
par..." et non "un film de...". Je trouve cette dernière
mention abusive. Encore plus quand le réalisateur, dont le nom
apparaît derrière le "de", n'est pas scénariste.
Même si je continue à penser que le scénario en est
le poste le plus important, un film est un travail d'équipe. Oui,
mais... a été écrit et réalisé
par moi-même mais aussi produit par François Kraus et Denis
Pineau-Valencienne, joué par Emilie Dequenne, Gérard Jugnot
et bien d'autres, éclairé par Pascal Caubère, mis
en musique par Philippe Rombi, etc, etc. Oui, mais...
n'existerait pas sans la centaine de personnes qui y a collaboré.
On m'a beaucoup demandé ce que cela faisait de passer de la théorie
à la pratique. Comme si j'étais descendu d'une sorte de
fauteuil universitaire, duquel j'aurais écrit La
dramaturgie, pour entrer dans l'arène artistique. Il m'est
difficile de répondre car cela ne correspond pas à mon parcours.
Quand j'ai rédigé La dramaturgie,
j'avais déjà étudié le scénario et
la mise en scène à Columbia University, écrit et
réalisé plusieurs courts métrages, écrit des
longs métrages et des épisodes de série, dont bon
nombre ont été tournés. L'écriture et la réalisation
de Oui, mais... m'ont énormément
enrichi mais n'ont pas constitué une très grosse surprise.
J'y ai retrouvé l'immense plaisir que j'éprouve à
écrire mais aussi à réaliser et à monter.
Et puis cela a confirmé ce que je savais déjà : il
est plus facile de donner des conseils que de les appliquer. Grande découverte
! En fait, la nouveauté avec ce film c'est que, pour la première
fois de ma vie, j'ai été directement confronté au
jugement des autres. Certes, mes courts métrages et mon travail
pour la télévision avaient été évalués
mais cela restait diffus. Eh bien je dois dire qu'être soumis au
regard des autres, que ce soit le public, la critique ou la profession,
est une position confortable. Je ne dis pas que cela fait toujours plaisir
mais je trouve cela sain et reposant. Juger les autres, même de
façon constructive dans La Dramaturgie,
ne m'a jamais mis très à l'aise. Le fait d'être jugé,
dans quelque domaine que ce soit, prouve au moins une chose, c'est qu'on
s'est mouillé. Je suis enchanté de m'être mouillé
et je n'ai qu'une envie : me mouiller de nouveau. En attendant, c'est
avec plaisir que je laisse le lecteur juge de ce qui suit. Et c'est avec
le même plaisir que j'accueillerai ses commentaires (à
cette adresse).
Yves Lavandier
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